Mardi 8 Avril

Je croise Jon, le patron de l’India, au petit déjeuner..il me confirme que nous pouvons jouer ce soir entre 7 et 9pm, et s’excuse de s’être emporté dimanche matin quand les stagaires ont joué, mais il ne faut pas jouer trop tôt dans l’enceinte de l’india…

Ce matin c’est trombone !

Dale s’est occupé de booker Craig Klein, tromboniste des Bonerama (orchestre de trombones), des New Orleans NightCrawlers… Un natif de New Orleans, mais blanc. On dirait un surfeur californien mais il est bien d’ici et sa famille compte de nombreux musiciens. Il écoute un morceau du groupe mais il souhaite repartir des fondamentaux « sans la tradition on ne peut comprendre et jouer la musique actuelle de New Orleans »… Down by the riverside… et puis il reparle des premiers brass band qu’ils ont motivé pour jouer cette musique, le Eureka Brass Band, Olympia Brass Band, (http://en.wikipedia.org/wiki/Olympia_Brass_Band), ceux sans qui le dirty et le rebirth ne seraient pas là. Une matinée tranquile avec un tromboniste d’une grande humilité.

Il se met à pleuvoir d’un coup, ici l’eau tombe très vite et très fort ! L’après midi sera pluvieux…

Voilà les black indians ! Walter Harris, le batteur-percussionniste, avec un cousin et un big chief…ce n’est pas Big Chief Ato Fayo, mais à peine arrivé Walter me donne son téléphone car Ato souhaite me parler…il s’excuse cent fois de ne pas pouvoir être là mais il n’a pu se libérer de son travail, il est policier, nous prenons rdv pour la prochaine fois, au prochain stage;-) En attendant nous allons correspondre par email pour préparer mieux tout cela, faire progresser la transmission de cette belle culture unique au monde et présente uniquement à New Orleans.

Ils ont ramenés 3 congas, 1 djembé, des tambourins, des cloches, une grosse-caisse…moi j’ai mes 3 tambourins, plus ceux des stagiaires, une cloche….on a du stock !!!

Les Blacks indians…à New Orleans j’ai trouvé ma ville d’origine, mais avec les blacks indians j’ai trouvé ma famille…pas que ma famille de sang soit distante ou que je la renie, bien au contraire ! Le fonctionnement des gangs indians sont tout à fait ce que je reproduis, à la française (dans le sens ou on ne peut pas transcrire la vie d’ici et notre vie en France)…mon brass band, les Zygos, c’est un gang d’indians. Tout ça pour dire que quand viennent les indians je ne pense qu’à ça…

Walter commence par faire un rapide historique du pourquoi des blacks indians. Pour faire vite, les noirs avaient besoin d’exprimer par tous les moyens le fait qu’ils avaient une culture propre et de le manifester de manière ostensible. La culture des indiens d’Amérique est celle qui leur ressemblait le plus, ou du moins ils partagent avec eux la résistance face à un ennemi commun, les occidentaux (blancs et colonialistes). Ils ont pris le mode de fonctionnement communautaire d’entraide, avec une ^place pour chacun et un Big Chief qui se porte garant de tout pour ses indians (financièrement, moralement, techniquement, logistiquement, etc…enfin tout ce qu’il peut faire et cela passe par la mise de côté de sa vie personnelle surtout concernant la fabrication de son costume). Le Big Chief doit tout connaître des autres gangs et il est surtout le garant du savoir faire des costumes avec une attention particulière à la « couronne ». C’est lui qui détient le savoir et le savoir faire. A partir de là, l’idée est de fabriquer tous les ans, si c’est possible, le plus beau costume qui soit, le plus flamboyant, le plus…. Il sortiront le jour de la St Joseph avec leurs gangs, les spyboys, les flagoys, les gangflags, les wildmen, les queens, plus la tribu compte de membres et plus elle est reconnue…Mais tout cela a un coup humain et financier pour des gens qui n’en ont généralement pas beaucoup..Le big chief sacrifie son temps et son argent pour défendre son clan, sa couleur, son quartier, il a un rôle politique d’intermédiaire avec les populations des quartiers, comme les leader , des « social and pleasure clubs », des Zulus, des Bones, etc…

Walter s’emporte, il est tellement plein de tout cela, explique qu’il a choisis de ne plus être indian (en costume) pour des raisons financières, des raisons familiales et aussi de choix professionnels liés à la musique. Il continue d’aider dans son gang et surtout il est le tambour du gang ! Poste au combien important, car c’est lui qui mène la locomotive rythmique et le rythme de déplacement du gang le jour J, de lui dépend la réussite de cette longue marche dans les quartiers de New Orleans pour aller dans des endroits stratégiques, porteurs de sens,et cela peut durer des heures…

Il s’arrête, respire fort, je me rends compte que moi aussi je transpire sans avoir bougé, juste à son écoute, j’ôte mon pull, il reprend son souffle…il pleure ?…en tout cas l’émotion est là…il s’en excuse…

Du coup les tambours se mettent en route, et puis chacun y ajoute sa percussion, nous chantons en répondant au big chief, la tension monte, ça prend tout le monde, la transe est là…vous expliquer les 2h qui ont suivies…rien à faire, c’est plein, fort, puissant, guerrier, mais inexplicable si on ne le vit pas…

Le workshop n’en finit pas, les hug, les calins du big chief, les remerciements pour ses moments partagés…tout cela doit se faire connaître ailleurs aussi, au delà de cette ville…les rdv sont pris;-)

Répétition rapide d’une set list, ou du moins des morceaux qui posent problème. Pause et puis retour à l’India, le groupe joue à 19h.

19h, c’est partit pour la vraie première de ce groupe, les places se trouvent, Kirk Joseph et Seva Venet sont tous deux passés écouter cela. Ils sont ravis. Le public lui s’est vite rentré après le premier set, la température est descendue, le vent s’est levé et il fait vraiment froid dehors…au moins nous n’avions plus de pluie !

La soirée continue à l’India tranquilement, certains filent voir le Rebirth BB au Maple Leaf sur les coups de 22-23h.